Apiculture

Débuter en apiculture amateur : combien ça coûte (vraiment) ?


Introduction

Je me suis lancé, j’ai acheté mes premières ruches. Une saison apicole et demie plus tard, je dresse un petit bilan concernant l’investissement que représente cette nouvelle passion pour les abeilles. Produire son propre miel, ça a un prix !

C’est à la mode, difficile de dire si c’est une bonne ou une mauvaise chose dans le contexte actuel du changement climatique mais :

– D’un côté de plus en plus de gens s’intéressent à l’apiculture et donc fatalement aussi aux ressources utilisées par les abeilles qu’elles doivent pouvoir trouver dans un environnement le plus sain et le plus naturel possible. Donc par ce biais l’apiculture et plutôt vertueuse en termes d’élan vers la protection de la nature.

– De l’autre côté cette tendance amène maintenant à trouver du matériel apicole et des ruches jusque dans les pauvres rayons « jardin » de certains supermarchés, à côté des barbecues et des produits pour piscine… Certains pensent donc possible de faire de l’apiculture un bien de consommation comme un autre, alors qu’on parle pourtant ici d’un élevage complexe d’animaux sociaux !

Heureusement, on ne commence pas à travailler avec les abeilles comme on prend un poisson rouge ou des poules dans son jardin ! L’apiculture est un élevage qui apparait vite « technique » et qui requiert de la curiosité, de la motivation et de la rigueur. Ce n’est pas un hasard si de nombreux ouvrages d’apiculture insistent en préambule sur la nécessité de se former avant de commencer ! Qui s’y frotte s’y pique !


Avant de se lancer

Pour ma part, en ce qui concerne l’indispensable formation, j’ai opté d’abord pour la lecture de nombreux livres sur plusieurs mois. L’idée était de me construire un premier aperçu de ce que pouvait être l’apiculture. Puis, toujours plus motivé, j’ai cherché puis rencontré un apiculteur expérimenté qui a accepté de partager avec moi une saison apicole et certaines de ses astuces.

On rencontre des apiculteurs en achetant du miel sur les marchés, dans les petites annonces de récupération d’essaims et en en parlant autour de soi ;-). Sinon, les solutions de formation sont nombreuses : formation apicole de quelques jours (association, instituts techniques, syndicats,…), ruchers-écoles, titre en apiculture (CFPPA, BPREA-Apiculture, BTSA)…

Concernant les livres, je me suis procuré et je ne regrette pas :

  • Le traité Rustica de l’apiculture (nombreux auteurs), paradoxalement très (voire trop) complet et à la fois trop léger en termes de pratiques concrètes au rucher.
  • Les fiches pratiques de l’apiculteur (G. Fert), un livre qui va à l’essentiel avec beaucoup d’illustrations pratiques.
  • L’apiculture en bande dessinée (Y. Gustin), une superbe BD pour débuter, avec des descriptions de méthodes bien éprouvées.

Un apiculteur m’a également prêté des ouvrages plus anciens et plus difficiles à trouver. On y trouve des chiffres, techniques et schémas très intéressants, toujours d’actualité (dont la fameuse méthode de l’éventail) :

  • Le rucher de rapport (A Caillas, 1974)
  • L’apiculture (P. JEAN-PROST, 1972)

Premier rucher

Dans la plupart des livres, il est conseillé de débuter avec 3 ruches. Car dans le cas où une ruche faiblirait, les deux autres permettent normalement de recréer un essaim. D’autres livres (et apiculteurs) conseillent de cibler un petit rucher de 5 ruches pour obtenir davantage de stabilité.

Cependant, cela représente un coût certain. Personnellement j’ai opté pour 2 ruches peuplées d’abeilles noires (sous-espèce locale réputée résistante) avec l’idée de créer une troisième ruche avec un essaim produit à partir des deux premières.

Autre conseil pour bien débuter : faire simple et choisir du matériel « standard ».

D’où mon choix pour des ruches types « Dadant ».


Alors, combien ça coute ?

Les budgets que je décris ici font référence aux années 2021-2022 dans des magasins spécialisées. J’ai essayé de lister par thème uniquement le matériel de base indispensable ou presque, à quelques exceptions près. J’ai arrondi les prix à l’euro supérieur pour simplifier.

À savoir qu’il est possible de faire de substantielles économies en adhérent à une coopérative, un groupement sanitaire ou syndicat d’apiculteurs possédant une boutique ou pratiquant des achats groupés. C’est aussi valable pour les traitements / médicaments et cela permet d’obtenir des conseils supplémentaires !

1/ Composition d’une ruche

ItemCoût
Corps à tenons bois 25 mm, type « Dadant » 10 cadres30
10 cadres de corps pré-filés15
Hausse à tenons bois 25 mm, type « Dadant » 9 cadres17
9 cadres de hausse pré-filés11
Nourrisseur couvre-cadre mixte (solide / liquide) en bois34
Mousse isolante sous toit3
Toit en tôle, h 105 mm11
Plateau type Nicot (ventilation totale) + porte + plaque d’hivernage13
Partition cadre en bois (modèle pour les suivantes qui pourront être fabriquées)16
2 fixe-éléments1
400 g de peinture naturelle (évite les composés organiques volatiles chimiques)12
TOTAL163

2/ Peupler la ruche

ItemCoût
Essaim abeilles sur 5 cadres (120 à 200 €)140
TOTAL140

3/ Matériel pour monter les cadres

ItemCoût
Roulette zig-zag (pour tendre les fils des cadres)16
500 g de cire en pain9
Burette en laiton simple paroi28
2 feuilles de cire gaufrées (pour faire une vingtaine d’amorces)
TOTAL58


4/ Traitements varoa et nourriture

ItemCoût
APIVAR ou APISTAN (bandelettes pour 5 ruches)24
API-BIOXAL ou MAQS (un volume pour 10 ruches)20
Mélange 1kg Candi / Pate protéinée 3
TOTAL47

5/ Matériel pour le rucher

ItemCoût
Enfumoir (il vaut mieux oublier sa combinaison que son enfumoir !)17
Combinaison « cosmonaute »62
Paire de gants latex12
Lève cadre6
Brosse8
TOTAL105

5/ Récolte du miel

ItemCoût
Couvre-cadre chasse abeille16
KIT RECOLTE
Couteau à désoperculer
Bacs à désoperculer
Centrifugeuse tangentielle inox 4 cadres manuelle
450
Seau maturateur 16 l (20 kg) + robinet18
36 capsules diamètre 828
36 pots 750 ml (1kg)35
TOTAL527

#/ Quelques options

ItemCoût
Stages et/ou formations à l’apiculture50 à 500
Livres50 à 200
Adhésion à un groupement de défense sanitaire apicole (GDSA)10
Abonnement à une revue (ex: la santé de l’abeille)20
10 feuilles de cire gaufrées « Dadant » 25
Eperon à chauffer13
Chalumeau gaz20

Coût total

Au regard de tous ces chiffres (et selon mon expérience perso), une ruche peuplée coûte autour de 300 €. Avec le matériel de départ pour les cadres, les manipulations au rucher et les traitements on arrive autour de 570 €. À ceci s’ajoute l’achat des livres mentionnés plus haut pour 80 € ainsi qu’une adhésion au GDSA + revue pour 30 €.

Mon premier rucher composé de 2 ruches peuplées d’abeilles noires m’a donc coûté à peu près 990 €. Pour trois ruches il faudrait compter 1290 €.

À ce stade on pourrait penser qu’un peu comme dans toutes les ruées vers l’or, ce ne sont pas les mineurs qui s’enrichissent le plus mais les vendeurs de matériel !


Pour faire quelques économies

Le meilleur moyen de faire des économies lorsqu’on débute en apiculture se retrouve dans le premier conseil donné : rencontrer un ou des apiculteurs !

  • Comme je l’ai dit plus haut, je me suis formé auprès d’un apiculteur aguerri pendant toute une saison, donc j’ai économisé le coût d’une formation (50 à 500 € selon les formules et les structures).
  • Un autre apiculteur m’a prêté sa centrifugeuse et le matériel d’extraction au moment de la récolte, donc là encore une belle économie à la clef (à partir de 450 € le kit pour débutant).
  • Une belle économie est réalisable en utilisant la technique des amorces voire des mini-amorces (voir photo ci-après). La cire gaufrée étant très chère (et contenant souvent des résidus de produits chimiques de traitement), on peut laisser les abeilles construire elles-mêmes leurs cadres. Il suffit juste de les guider un peu. J’ai fait la comparaison cire gaufrée versus amorce, je n’ai pas vu la différence ! Quand elles sont « motivées », les abeilles bâtissent les cadres en quelques jours !
  • On voit aussi rapidement l’intérêt qu’il y a à savoir produire des essaims artificiels soi-même (économie de 140 à 200 € par essaim), voire à produire des reines (encore plus technique mais pas évident pour les débutants). Là aussi on peut apprendre des techniques auprès d’apiculteurs.
  • Enfin, ça va sans dire mais être « bricoleur » c’est très intéressant pour faire des économies. On peut fabriquer (par ordre de complexité et selon le matériel nécessaire) des partitions, des supports de ruches, des nourrisseurs, des ruchettes et le summum : ses propres ruches ! …

Attention, il pourrait être tentant de récupérer des vieilles ruches, toujours pour faire des économies. C’est une fausse bonne idée, souvent déconseillée, car le vieux matériel peut contenir des spores de diverses maladies, des virus, dont on se passera bien !


Alors, est-ce que ça vaut le coût ?

Difficile de répondre à cette question car on ne se lance pas dans l’apiculture amateur avec un objectif de rentabilité, c’est plutôt un loisir-passion au travers duquel on découvre des insectes sociaux qui ont des comportements extraordinaires !

En tout cas je peux dire que lorsqu’on ouvre pour la première fois le robinet de l’extracteur et qu’on voit couler notre premier miel, OUI ça vaut le coût 🙂 !

Cependant, ça reste un travail intéressant de savoir si tout ce temps et cette énergie déployés (et l’argent dépensé) pour élever des abeilles rapportent autre chose que la fierté d’avoir produit soi-même son propre miel ! Bien sûr, on part ici du principe qu’on aime manger et offrir du miel, qui est un mélange de sucres bien plus sain que le sucre blanc industriel produit à grand renfort de pesticides…

Ensuite, il faut savoir qu’une ruche en bonne santé, « bien conduite », avec une bonne météo, des ressources importantes en pollen et nectar peut produire autour de 30 kg de miel en une année (de l’avis de plusieurs apiculteurs et livres). Dans les ouvrages on peut même lire des records atteignant 90 à 120 kg de miel produits par des colonies exceptionnelles !


Dans le petit tableau qui suit, à gauche j’ai noté le volume de miel produit au rucher et à droite des prix au kilogramme rencontrés sur les marchés. Ces prix varient selon le type de miel et les régions de production, 12 € étant un prix fréquent et correct pour du miel de débutant type « toutes fleurs » et/ou « de montagne ». Le miel crémeux de lavande produit dans le sud est souvent plus cher…

Volume \ prix au kg8 €10 €12 €14 €16 €
10 kg80100120140160
30 kg240300360420480
90 kg720900108012601440

Ces chiffres montrent que SI on parvient à produire du miel, on amortit assez rapidement le coût de l’installation du rucher. Mais derrière le « SI » il y a tellement de paramètres… Pour ma part, sur ma première saison avec une météo moyenne et des records de chaleur, j’ai récolté 11 kg de miel avec mes deux ruches, soit l’équivalent de 130 € de miel, loin des presque 1000 € qu’a coûté mon petit rucher. De plus, malgré toutes les précautions et conseils que l’on m’a donnés, mon premier essaim artificiel censé peupler ma 3ème ruche avait bien démarré (présence de plusieurs cellules royales) mais a finalement échoué sur la fin.

Que va me réserver ma seconde saison ? Je ne le sais pas encore mais je suis très impatient de recommencer ! C’est ça le virus de l’apiculture...

Un magnifique cadre de hausse gorgé de miel !

2 réflexions sur “Débuter en apiculture amateur : combien ça coûte (vraiment) ?

  • Je scrutais régulièrement votre blog pour guetter la venue d’un nouvel article, toujours aussi plaisant à lire et instructif! Je suis rassuré de voir que vous êtes toujours en activité. Merci 😉

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    • Merci pour votre message. Blogguer est très chronophage et il y a eu beaucoup de changement dans ma « vie réelle » l’année passée. Mais ça fait bien plaisir de savoir qu’il existe quelques « fans » de Blognature ! Merci 🙂

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