Le bio, une idée en plastique ?
Ce petit article pour partager mon mécontentement à propos des nouveaux emballages des fruits et légumes bio. Et également pour expliquer pourquoi je n’achète plus de « bio », en tout cas chez les grands distributeurs.
Constat
Vous l’avez sûrement remarqué dans votre grande surface préférée, les produits frais bio sont de plus en plus, voire tous emballés dans du plastique. La preuve en image dans mon supermarché Leclerc dont l’étalage « bio » arbore fièrement toutes ces couleurs plastifiées :
Je n’ai pris conscience de ce nouveau phénomène que récemment car il était encore marginal il y a peu. Mais là ça saute aux yeux. Brusquement, ma main s’est arrêtée alors qu’elle allait s’emparer machinalement d’une de ces prometteuses mini-barquettes de 4 pommes ! ma réaction :
C’est n’importe quoi ! Comme si des pommes ou mieux des oranges avaient besoin d’être emballées ! C’est ridicule !
Dans le même magasin, la même allée, mais juste en face, on trouve les fruits « classiques » déjà eux-mêmes à l’allure bien artificielle, mais sans emballage :
Petite parenthèse, j’ai contacté le service client pour leur faire part de mon étonnement sur ces nombreux nouveaux emballages. J’ai rapidement obtenu la réponse suivante :
Merci de l’intérêt que vous portez à E.LECLERC.
Nous avons pris connaissance de votre demande concernant le développement durable.
Nous avons pris bonne note de vos remarques et vous informons les avoir transmises ce jour à notre service marketing.
De plus, pour en savoir plus sur les initiatives de l’enseigne à ce sujet, nous vous invitons à visiter ce site Internet :
http://www.mouvement.leclerc/
C’est toujours ça !
Officiellement, les produits « bio » sont emballés pour :
- marquer leur différence avec les fruits et légumes classiques
- assurer une traçabilité
Il y a quelque temps j’étais presque « fier » de constater la disparition, ou plutôt le remplacement des sacs plastiques par des sacs compostables. Fier de mon magasin, fier de mon pays ayant réussi non sans mal à faire passer une loi interdisant les sacs plastiques. C’était pour moi un net pas en avant.
Pourquoi s’inquiéter ?
Comme le rappellent de nombreuses ONGs dont la fondation Nicolas Hulot :
D’ici 2050, la masse de plastique dans les océans sera plus importante que celle des poissons.
Chaque seconde, 500 kg de plastique sont jetés dans les océans.
Hélas, beaucoup d’entre nous doutent encore que la pollution par le plastique est un fléau et beaucoup ne se sentent même pas concernés par le sujet… Certains diront même :
J’y suis pour rien, je ne vis pas au bord de la mer moi !
Un pas en avant pour deux pas en arrière
Donc bilan pour ma grande surface : fini les sacs plastiques mais bonjour les nouveaux emballages plastiques pour le bio. Bien entendu, à qui profite réellement ce déplacement du plastique depuis les sacs vers les produits frais ? Chacun trouvera la réponse facilement.
Bref, la « différence » ou la « traçabilité » sont les arguments idéaux pour défendre cette vaste escroquerie dans laquelle se roulent (peut-être bien sous contrainte) les produits bio vendus en grande surface.
Paradoxe sordide
N’y a-t-il pas quelque chose qui choque dans le concept du « bio emballé dans du plastique » ?
Au départ, il me semble que l’agriculture bio est censée protéger l’environnement ou au moins aller dans le sens du développement durable. Or, là c’est un peu comme si on faisait bouillir de l’eau pour ensuite la filtrer avec une chaussette sale.
Sans oublier que certaines exploitations n’hésitent pas, protégées à l’occasion par des dérogations « officielles » et « exceptionnelles », à traiter massivement certaines cultures pour satisfaire les rendements… Il faut se rappeler aussi que même si l’agriculture bio écarte les produits de synthèse, elle est souvent obligée en conséquence de traiter davantage avec des agents comme le cuivre ou le souffre que l’agriculture classique.
Enfin, le seul et vrai bio, c’est celui de votre potager si vous ne le traitez pas !
Le choix des consommateurs ? non !
On nous fait croire que si les produits sont triés, calibrés, et maintenant emballés c’est que les consommateurs les préfèrent ainsi.
Je ne peux pas croire ça ! Peut-être que quelques bobos urbains interrogés par des enquêtes mal conçues apprécient d’acheter 4 petites oranges « à déguster » sous emballage plastique !
Bien sur qu’elles sont à déguster, ce sont des oranges ! Mais elles sont déjà naturellement emballées bon sang !
Un article de National Geographic précisait récemment qu’en condition de baisse de production, et donc de tension du marché, la qualité de certains fruits et légumes diminue (quelques tâches de couleurs apparaissent dans les lots, des piqûres, quelques produits mal-formés…). On retrouve alors ces produits à l’étale car les grandes surfaces sont contraintes d’acheter « ce qu’il y a » ! L’étude a montré l’absence d’impact sur le consommateur qui achète, de fait, « ce qu’il y a » ! C’est à dire, pas de conséquence financière pour le distributeur !
Existe-t-il une sorte de confiance aveugle envers les produits des grandes surfaces ? Peut-être bien !
Conclusion, le consommateur n’a rien à voir dans tous les choix qui sont fait en amont pour vendre plus sans jamais s’inquiéter des conséquences sur l’environnement !
Le bio pourrait très bien ne pas être emballé, il se vendrait de la même manière. Ce n’est plus possible de croire que le consommateur est coupable, c’est faux.
Et il y a un deuxième paradoxe ici : on nous invite à acheter toujours plus tout en nous culpabilisant :
Achetez nos beaux produits bio bien emballés mais attention, évitez d’acheter des produits avec trop d’emballage !
Un jour, une enquête va montrer que les consommateurs préfèrent les produits emballés dans du plastique qui protège lui-même l’emballage plastique. C’est certain, ça sera un meilleur produit, donc davantage choisi par les consommateurs !
Le pire des arguments
A l’heure actuelle, le pire des arguments qu’on nous sert régulièrement c’est celui-ci :
Mais vous comprenez, si demain on interdisait le plastique, ça casserait beaucoup d’emplois.
Nous avons même des ministres de l’écologie qui utilisent ces tournures.
Nous sommes complètement fous. En seulement 40 ans nous avons perdu la moitié des animaux de la planète, une extinction si rapide qu’elle n’a jamais été égalée dans l’histoire. Mais emballons, emballons, emballons, dans du plastique !
Les solutions ?
1/ C’est peut-être ridicule ou inefficace mais personnellement j’ai complémentent arrêté d’acheter des produits « bio » dans ma grande surface et je suis retourné chez ma primeur du coin pour tous les fruits et légumes. Car même si elle ne vend pas forcément du bio, qu’elle est un peu plus chère, au moins ses sacs sont en papier et surtout facultatifs et j’encourage l’économie locale, certainement un peu plus « verte »…
2/ N’autorisons le plastique que dans les situations où il est indispensable c’est à dire sans alternative possible. Et en aucun cas le coût plus élevé d’une alternative doit être un argument pour l’exclure !
3/ Si l’emploi est le nerf de la guerre, il y a des millions d’emplois à pourvoir pour dépolluer la planète, mais encore faudrait-il qu’on accepte de financer un jour le grand nettoyage et de rendre la richesse à celle qui nous donne tout et tout le temps : la terre !
Le libre service des fruits et légumes
Je termine pas une initiative sympa et alternative pour se procurer des fruits et légumes de qualité et favoriser l’économie locale et les circuits courts : le libre service du projet « En direct de nos fermes« .
Il s’agit d’une nouveauté ici à Avignon mais cela existe déjà un peu en France. Des casiers en libre service sont alimentés deux fois par jour par des produits venant des fermes du coin. Il suffit de choisir son casier, de payer, et de repartir avec le contenu.
Mieux, il y aura bientôt un site internet permettant de composer son panier que l’on pourra récupérer ensuite par exemple en sortant du boulot ! Un super concept.
Comme quoi il y a bien un autre monde possible…
Et oui, notre monde est aussi étrange que paradoxale. Et la plupart des arguments pour justifier le mal qu’on fait à la planète sont du style : « On ne peut pas arrêter de mettre le feu, sinon il n’y aura plus de pompiers ! » 😉
Quelle tristesse ! 🙁
C’est clair.
Bonjour,
tout à fait en accord avec cet article, j’ai à ce propose lancé une pétition pour interdire l’utilisation d’emballage plastique pour les fruits et légumes bio.
https://www.change.org/p/minist%C3%A8re-de-la-transition-%C3%A9cologique-supprimer-les-emballages-des-fruits-et-l%C3%A9gumes-bio-des-supermarch%C3%A9s
Merci pour ce partage.
Bonjour,
J’habite en centre ville et suis moi aussi ulcérée de tout ce plastique, incompatible par essence avec la notion de bio. Une réponse qui remet la responsabilité là où elle doit être: ni sur les producteurs, ni sur les consommateurs mais sur le désir d’économiser à tout prix des grandes surfaces, ici:
http://www.la-croix.com/Archives/2012-07-02/Pourquoi-les-fruits-et-legumes-bio-sont-ils-sous-emballage-en-grandes-surfaces-_NP_-2012-07-02-826305
Merci beaucoup pour cet article qui donne de vraies réponses et nous permet de mieux comprendre le pourquoi de ces emballages, bien que ceux-ci n’en restent pas moins aberrants.
Je suis tout à fait d’accord avec ton article ! Les fruits et légumes bio en sachet sont un contre-sens ! Je n’en achète plus en supermarché mais vais chez mon primeur ou dans mon jardin !